STAGES LITTERAIRES
Troisièmes Journées Interdisciplinaires “Sciences & Fictions” : Les Subjectivités Collectives
La Conscience malheureuse - L'Exode

Troisièmes Journées Interdisciplinaires “Sciences & Fictions” : Les Subjectivités Collectives

Organisateur :

Institut Robert Hooke de Culture Scientifique de l'Université de Nice-Sophia-Antipolis,

Coordinateurs :

Ugo Bellagamba et Eric Picholle

Dates :

21 au 24 mai 2009

Participants :

Universitaires : Ugo Bellagamba, MCF Nice, Histoire du droit; Roger Bozzetto, Prof. Aix-Marseille, Littérature; Jean-Luc Gautero, MCF Nice, Philosophie ; Eric Picholle, CNRS, Nice, Physique (LPMC); Marc Ortolani, Prof. Nice, Histoire du droit; Jean-Jacques Régnier, Aix, Ingénieur de Recherche, MSH.; Yannick Rumpala, MCF Nice, Science Politique; Jean-Louis Trudel, Docteur en Histoire des Techniques
Doctorants & Post-docs : Estelle Blanquet, doctorante, Nice, Didactique des sciences; Simon Bréan, doctorant Paris, Philosophie; Grégory Lemonnier, Littérature, Rennes, ATER; Daniel Tron, ATER Angers, Cinéma SF
Professionnels : Anouk Arnal, ingénieur agronome; Isabelle Limousin, conservateur du patrimoine (INP); Alain Rey, enseignant; Frédérique Rey, enseignante; Michel Zaffini, psychanalyste
Ecrivains : Sylvie Denis, Claude Ecken, Gérard Klein, Serge Lehman, Roland Wagner


Compte rendu :
Pour la troisième année consécutive, l'Institut Robert Hooke de Culture Scientifique de l'Université de Nice-Sophia-Antipolis, a organisé, en partenariat avec l'ASBL Nicolas-Claude Fabri de Peiresc - Peyresq Foyer d'Humanisme et l'association “Physique à Nice”, les Journées Interdisciplinaires “Sciences & Fictions” (Workshop), à Peyresq du 21 au 24 mai 2009.
Reconnues comme un outil de fédération de la communauté universitaire francophone de science-fiction, cette troisième édition de nos Journées a mis en présence des doctorants, des chercheurs confirmés, des auteurs, des éditeurs, des traducteurs, rassemblés autour du thème des “Subjectivités Collectives”. Le choix, cette année, de plonger dans les profondeurs d'une notion, résolument interdisciplinaire et novatrice, plutôt que de naviguer entre les îles chatoyantes d'un parcours d'auteur (Robert A. Heinlein, en 2007 ; Rudyard Kipling, en 2008), était tout particulièrement ambitieux.

Gérard Klein, écrivain, anthologiste, économiste, prospectiviste, théoricien et directeur de collection (“Ailleurs et Demain”, Robert Laffont), a dégagé la notion de “subjectivités collectives” dans un article intitulé “Trames et Moirés”, dans Science-fiction et psychanalyse. L'imaginaire social de la SF, études réunies par M. Thaon (Dunod, 1986). Gérard Klein était tout naturellement l'invité d'honneur de ces Troisièmes Journées Interdisciplinaires, et son article, sur lequel se sont appuyés les débats, fera l'objet d'une nouvelle publication aux éditions du Somnium, en 2010.
Un résumé chronologico-thématique des quatre journées rendra sensible, plus qu'un programme, la variété des thèmes abordés et l'ampleur des résultats obtenus.

Eric Picholle, organisateur, ouvre la journée du jeudi 21 mai 2009, en expliquant le choix de la notion de “subjectivités collectives” comme outil de travail : vaste et fascinant, l'article de Gérard Klein qui dégage la notion, et qui été étudié préalablement par tous les participants présents, “ouvre de riches pistes de réflexion en direction des sciences dures, de la psychanalyse, de la sociologie, de l'économie, des idées politiques, etc”. La notion sera interrogée sous divers angles dans une série de sessions thématiques, modérées.

Gérard Klein présente une conférence introductive dans laquelle il propose aux participants de réfléchir à la question suivante : “Un être humain isolé peut-il penser ?”. Il y répond, pour sa part, par la négative : pour penser, un être humain doit posséder le langage, qui, à ses yeux, n'a pas une origine conventionnelle. Le cerveau apprend le langage en recevant des informations de son environnement et de son groupe social. Les sources “extraordinairement multiples” qui nourrissent le cerveau sont émises par ce que Gérard Klein appelle les “subjectivités collectives” et qui, elles-mêmes, naissent des relations qui structurent le groupe social. La conscience, la pensée n'est possible que parce “chacun de nous est un ensemble de subjectivités collectives” qui entretiennent entre elles des liens, forment une trame sur laquelle se construit la personnalité, telle un effet de moiré. Gérard Klein explique que son intention était, non pas de dégager un concept, mais d'indiquer au lecteur, ou au chercheur, “la direction dans laquelle il faut regarder”. C'est d'abord une question de “point de vue”, de parcours. C'est pourquoi Gérard Klein prend le temps de retracer brièvement le sien, résolument pluridisciplinaire, mêlant économie, sociologie, psychologie, écriture et, bien sûr, psychanalyse.
En 1967, sur une sollicitation des éditions de l'Herne, Gérard entame l'étude de l'œuvre et de la correspondance d'Howard Philips Lovecraft (1890-1937), dans une approche psychanalytique. Il s'aperçoit que les contes de Lovecraft parlent de la réalité sociale de son temps : ainsi, “La couleur tombée du ciel” (1927) est une métaphore de ce qui arrive à l'agriculture américaine dans les années trente, avec la constitution de monopoles et le recours généralisé aux engrais et leurs effets (couleurs superbes des fruits, mais un goût et des qualités nutritives en déclin). Mais, cet aspect interprétatif du texte semble être tout à fait indépendant de la volonté de l'auteur. Gérard Klein y décèle des subjectivités collectives à l'œuvre, transmettant des informations à un niveau infra-conscient. Des années après, en 1986, Marcel Thaon, qui, alors, enseignait la psychanalyse à l'université d'Aix-en-Provence, lui demande son accord pour reprendre son essai, dans un volume interrogeant les liens entre science-fiction et psychanalyse. À cette occasion, Gérard Klein écrit une longue introduction qui devient le cœur du dispositif théorique de sa réflexion sur les “subjectivités collectives”.

À la suite de Gérard Klein, Jean-Louis Trudel (auteur d'une thèse de doctorat sur “la théorie de l'innovation”) présente une conférence (multimédia) sur le thème de “La singularité des années trente et la science-fiction”.
Il s'appuie sur la notion de singularité de Ray Kurzweil et sur les éléments, futuristes pour l'époque, de l'exposition universelle de New-York. Selon Kurzweil, le développement exponentiel de l'innovation technologique laisse présager, dans les dix années à venir, l'émergence d'une intelligence artificielle qui dépassera les capacités cognitives et créatives de l'humain. Un article de Vernor Vinge, plus récent, transpose cet argument dans la littérature de science-fiction en montrant que la survenue de cette singularité explique l'inaptitude des écrivains à anticiper un futur proche réaliste. Jean-Louis Trudel opère alors un lien avec l'exposition universelle de New-York, en 1939-1940, qui, mettant en lumière des innovations technologiques, a pu stimuler l'imagination des auteurs de science-fiction de l'époque, et jouer, en quelque sorte, le rôle d'une singularité. Isaac Asimov, par exemple, aurait été inspiré par des robots expérimentaux qui y étaient présentés. Le pavillon “Futurama” prêchait entre autres la croyance à un avenir radieux, grâce aux nouvelles applications de la science : l'électrification qui s'étend jusque dans les campagnes, les débuts de l'électronique, etc.
On pourrait y voir l'expression d'une “subjectivité collective” qui aurait conduit les auteurs de science-fiction américains (notamment) à croire à un futur ultra-technologique, au ciel peuplé de voitures volantes, dont on retrouve un écho dans les textes publiés dans les “pulps” de science-fiction de la même époque. Ils avaient, à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, le sentiment partagé d'être en face d'une singularité technologique selon la définition de Ray Kurtzweil qui, toutefois, ne s'est pas réalisée. En ira-t-il de même de celle qui est attendue dans les années 2025 ?

Le lendemain, vendredi 22 mai 2009, la première session thématique a pour titre : “Subjectivités collectives et naissance d'un genre”. Elle vise à interroger les liens entre la communauté de la science-fiction francophone, envisagée comme un agrégat d'individualités rassemblées par des représentations technoscientifiques, des valeurs, et des techniques narratives, et la notion même de “subjectivité collective”. Y aurait-il une passerelle entre la naissance du genre “science-fiction” et les subjectivités collectives ?
La session est ouverte par Serge Lehman (auteur, anthologiste) qui en sera aussi le modérateur. Avant de devenir une catégorie éditoriale, sous l'impulsion de Hugo Gernsback, dans sa revue Amazing Stories, la science-fiction existait déjà en tant forme esthétique, depuis plusieurs décennies. Un article de Maurice Renard, paru dans Le Spectateur, en 1909, sous le titre “Du merveilleux scientifique et de son action sur l'intelligence du progrès” l'atteste. Le débat s'ouvre sur la place des écrivains de science-fiction dans la cité et dans le milieu littéraire de leurs temps. La plupart apparaissent comme des marginaux et les cas d'Edgar Poe, de Jules Verne, d'Herbert G. Wells et de Sir Arthur Conan Doyle, sont évoqués. Il y a un moment, en Europe, où d'avant-garde esthétique, la science-fiction bascule se retrouve rejetée par l'élite intellectuelle. Cette situation européenne n'a rien à voir avec celles des “pulps” américains qui s'inscrivent délibérément hors du champ littéraire classique, jouant la carte de l'imaginaire scientifique. La première guerre mondiale a certainement joué un rôle décisif dans cette évolution, en suscitant notamment le rejet des technosciences par le grand public, et de la littérature qui, apparemment, les glorifiait.
Mais la violence du rejet ne peut être expliquée par ce seul aspect. Il y a aussi, dans la science-fiction, une aspiration métaphysique : nombre de textes parlent de dieux, de transcendance, de surhommes, ce qui gêne considérablement le monde de la littérature pour laquelle la question de l'angoisse métaphysique n'est plus digne d'intérêt, voire suspecte depuis l'horreur dévoilée des camps de concentration et la puissance destructrice de la bombe atomique.
S'il y a bien une subjectivité collective à l'œuvre dans la communauté de science-fiction, celle-ci pourrait avoir pour centre de gravité cette “aspiration métaphysique” dont la notion de singularité, évoquée plus haut, est la forme la plus achevée.

La session suivante est consacrée à la question : “Les mythes sont-ils une physique sociale ?”. Son modérateur, Simon Bréan (Philosophie), ouvre le débat sur les interprétations du mythe et leur rapport avec les “subjectivités collectives” : tout d'abord, il paraît difficile d'avoir une perception objective du mythe, puisque, par essence, il évolue, il est modifié, enrichi, à chaque transmission ; ensuite, les mythes sont, selon la pensée structurale de Claude Lévi-Strauss, des ensembles de “mythèmes” qui, en interagissant, constituent toutes les mythologies ; enfin, c'est par la perception changeante des mythèmes au fil des générations, qui passe généralement par un syncrétisme entre les récits antérieurs, qu'il est possible de rejoindre la notion de “subjectivité collective”. Les mythes pourraient être alors considérés comme une porte d'accès vers les subjectivités collectives qui sont partagées par l'ensemble d'un groupe social doté d'une histoire propre, et pas seulement par quelques groupes d'individus ; ce que confirme Gérard Klein, lorsqu'il évoque le caractère “transversal” des subjectivités collectives. L'accord des participants se fait sur l'idée novatrice que les mythes pourraient être des subjectivités collectives “fossilisées” par le temps.

L'après-midi est consacrée à deux sessions thématiques. La première qui porte sur “Littérature, fiction et psychanalyse”, est modérée par Roland C. Wagner (auteur) qui ouvre les débats en s'appuyant sur les romans de Valerio Evangelisti (auteur italien) consacrés à l'inquisiteur Nicolas Eymerich qu'il inscrit dans un univers résolument composite, entremêlant polar et science-fiction. Dans le quatrième tome de la série, Nicolas Eymerich entre en communication avec Wilhlem Reich, célèbre psychiatre et psychanalyse autrichien qui fut l'élève de Sigmund Freud et travailla sur une énergie d'”orgone”, dont l'existence ne fut jamais scientifiquement démontrée. La rencontre imaginaire entre les deux personnages, le jeu sur leurs actes et leurs théories, donne un roman qui joue sur les subjectivités collectives. Plus largement, il y a une riche tradition de romans à clef psychanalytique en science-fiction : des textes de Dick, Lafferty, Sturgeon, sont évoqués par les participants. Si la plupart des romans des années cinquante présentent le psychanalyste comme un manipulateur, ou un traitre, c'est parce qu'on est dans la période où les fantasmes scientifiques sur le contrôle mental et la parapsychologie font florès, jusqu'à susciter l'intérêt de la C.I.A. Les textes les plus frappants sont toutefois ceux qui mettent en scène la réification d'éléments psychiques, qui “sortent” de l'esprit du patient pour interagir avec le réel. Si la littérature est l'équivalent collectif du rêve pour l'individu, comme le dit Gérard Klein, alors les “structures fondamentales” de la psyché offrent un champ à défricher, dans lequel s'expriment les subjectivités collectives.

La deuxième session, modérée par Ugo Bellagamba, interroge la nature des “communautés politiques”. Il s'appuie sur les “Lieux de mémoire”, ensemble d'études d'historiens sur les concepts de nation et de république, notamment françaises, dirigées par Pierre Nora. Il rappelle les composantes essentielles d'une “communauté politique” : le vivre ensemble, le partage des valeurs, la transmission de ces valeurs aux enfants, ainsi qu'une organisation juridique et politique ; ce dernier point n'implique pas, nécessairement, comme l'a montré l'anthropologie, l'existence d'une structure étatique. Selon Pierre Nora, la communauté politique s'incarne dans des “lieux de mémoire” qui, tout à la fois, ponctuent son histoire et sont l'expression de ses valeurs cardinales : il s'agit, par exemple, des archives (nationales), des monuments (aux morts), des fêtes (républicaines), des dictionnaires, des musées, etc. Autant de “lieux-carrefours” qui, comme les subjectivités collectives, sont pluriels. Ces lieux de mémoire sont parfois relayés par l'art, comme, le montre, par exemple, le tableau d'Ernest Pichio, Le triomphe de l'ordre, datant de 1877 et faisant explicitement référence au “mur des fédérés”, partie de l'enceinte du cimetière du Père Lachaise contre laquelle 147 communards furent fusillés en mai 1871.
D'où la question : “existe-t-il des lieux de mémoire de la science-fiction ?” Il pourrait s'agir d'éléments divers tels que les grands classiques, les conventions mondiales et les prix qui y sont remis, les néologismes qui passent ensuite dans le langage courant, ou les grands thèmes comme le voyage dans le temps, qui se sont transmis de génération en génération. En proposant une expérience de pensée, la science-fiction peut alors permettre de comprendre que l'individu n'est qu'une charnière entre la communauté politique à laquelle il appartient et les subjectivités collectives qui le composent. Pour Serge Lehman, la science-fiction est bien la littérature qui s'adresse directement aux subjectivités collectives, en inventant le “le héros collectif” et en produisant des récits qui en sont le reflet.


Le samedi 23 mai, au matin, sont examinées tout d'abord “les racines collectives du langage”, sous la modération de Daniel Tron (angliciste), puis, dans une session thématique que l'on retrouve chaque année à Peyresq depuis les premières Journées de 2007, est abordée la question-clef du “désir de science chez les jeunes”. Jean-Louis Trudel (Histoire des Techniques) la modère, et présente un rapport de l'O.C.D.E (2006) qui montre que les chiffres trahissent une désaffection pour les études scientifiques dans les pays européens, avec une baisse marquée des formations les plus spécialisées et les plus longues. Il utilise, en contrepoint, l'exemple du Québec. Dans les années soixante-dix, les études de sciences appliquées (informatique, génie civil et génie mécanique) étaient encore en progression tandis que celles de physique fondamentale baissaient de près de 10%. Parallèlement, le nombre de femmes poursuivant des études scientifiques allait croissant dans les “sciences de la vie” (biologie), en particulier.
La perspective de départs à la retraite massifs, en Europe, au Canada, ou aux États-Unis, fait craindre aux politiques un non-renouvellement des cerveaux et un manque crucial d'ingénieurs, par rapport aux pays en pleine croissance économique, notamment l'Asie. En France, enfin, de nombreux rapports insistent sur la désaffection marquée pour les études dites “scientifiques”. Toutefois, les chiffres ne sont pas si inquiétants : la baisse du nombre de doctorants, d'effectifs, ne correspond pas nécessairement à un besoin, et rend moins problématique la baisse programmée du nombre d'enseignants, du fait des départs en retraite. Il apparaît aussi que la démocratisation des études scientifiques a des effets paradoxaux : les formations courtes, tournées vers les sciences appliquées, sont plus nombreuses et se féminisent ; la pré-orientation au lycée, en filière “physique-chimie”, favorise l'accès aux études universitaires; seule la filière “mathématiques”, toujours très masculine, semble mener à des études longues (doctorat).
D'où la problématique transversale qui fait écho à celle du rapport Porchet de 2002 : 63% des étudiants en section scientifique sont confiants en leur réussite et leur avenir professionnel, et affirment avoir choisi cette filière par goût (ou par désir) ; mais de plus en plus des lycéens ne se sentent pas capables de suivre des études scientifiques alors même qu'ils en ont le désir. Pour s'attaquer à cette “crise des vocations” qui affecte les études scientifiques, des programmes fondés sur la pratique des sciences sont à l'œuvre, en Europe et en France (ex : “Hands on !”).

La dernière session, présentée par Eric Picholle, le samedi 24 mai, au matin, est consacrée à un choc des notions: “subjectivités collectives vs paradigmes scientifiques”. La possibilité de partage d'une expérience est l'un des fondements des subjectivités collectives, qui suppose une communication entre les individus. Or, cela a un poids tout particulier en sciences et l'exemple de la communication entre deux physiciens, évoquée dans “Trames et Moirés” le rappelle : “lorsque deux physiciens s'efforcent de communiquer à propos d'une expérience ou encore de vérifier l'identité de deux expériences, ils essaient dans un domaine volontairement très limité, de faire tendre des mots et des symboles à devenir des codes”. Mais l'épistémologie ne se résume pas à une méthode de communication. La science doit aussi en passer par la méthode de recherche, individuelle mais partagée.
Du point de vue des subjectivités collectives, dans le cas d'une expérience vraiment nouvelle, qui n'aurait fait l'objet d'aucune communication, comment la partager? Dans le raisonnement de Gérard Klein, “percevoir” cette nouveauté et abandonner une subjectivité collective passée, revient à former une nouvelle subjectivité collective, un nouveau groupe social. C'est ce que font les physiciens : ils communiquent une observation, permettent à leurs collègues de la vérifier, de la reproduire, de les rejoindre dans une communauté qui la partage. Ainsi, la révolution qui, de Copernic à Kepler, amène la victoire de l'héliocentrisme, ou les révolutions de la relativité, galiléenne comme einsteinienne, pourraient être le signe de puissantes subjectivités collectives à l'œuvre.
Il faut les confronter à la définition du “paradigme scientifique”, tel que l'a posé Thomas Samuel Khun et qui fait l'objet, aujourd'hui, d'un très large consensus, en intégrant non seulement la communication scientifique, mais aussi la méthode et les objectifs de la recherche, qu'ils soient proches ou éloignés, et la validation des résultats obtenus. Du point de vue des subjectivités collectives, une “révolution scientifique” se traduit par l'abandon de plusieurs d'entre elles, au profit de nouvelles.

Pour une synthèse détaillée des Troisièmes Journées Interdisciplinaires de Peyresq, et l'ensemble des articles complétant les débats, ainsi qu'une nouvelle édition de “Trames et moirés” de Gérard Klein, consulter Subjectivités Collectives. Actes des Journées Interdisciplinaires de Peyresq, 21 – 24 mai 2009, éditions du Somnium, à paraître (mai 2010).
Pour tout renseignement complémentaire sur les journées “Sciences & Fictions” 2010, qui se concentreront sur la “Hard-Science-Fiction”, contacter Eric Picholle : eric.picholle@unice.fr

Ugo Bellagamba



La Conscience malheureuse - L'Exode

Organisation : Société d'étude Benjamin Fondane
Coordinateur : Monique Jutrin
Dates : 16 au 24 août 2009
Internet : www.fondane.org
Participants : Ciprian Verestius (Ro), Estersohn Willy (B), Filimon Maria (Ro), Gonzi Alice et Alessio (I), Gruson Claire (F), Guedj Dominique (F), Jutrin Monique (Il), Kuhnle Till (D), de Lussy Eric (F), Lenz Hélène (F), Martin Mircea (Ro), Milancovici Speranza (Ro), Milancovici Carmen (Ro), Namenwirth Evelyne (B), Oszi carmen (Il), Piron Geneviève (CH), Margaret et Serge Teboul (F), Villela Maria (F), Wiedner Saskia (D), Zultak Lucy et Isi (F).
Compte rendu : La Conscience malheureuse et L’Exode

La Conscience malheureuse
Lecture de texte par Dominique Guedj
Geneviève Piron : Fondane lecteur de Chestov
Till R. Kuhnle : L'insoutenable fardeau de l'être
Alice Gonzi : Fondane et Nietzsche
Margaret Teboul : Nietzsche et les philosophies de l'existence
Maria Villela-Petit : Au nom du singulier : le défi de Fondane à Husserl
Saskia Wiedener : Fondane et Baruzi
Eric de Lussy : Réception de la Conscience malheureuse

L'Exode. Super flumina Babylonis
Monique Jutrin : Les phases d'une gestation
Claire Gruson : Lecture des strophes alphabétiques
Evelyne Namenwirth : La voix, le chant et le souffle dans L'Exode

Aspects de l’œuvre roumaine
Mircea Martin : Dédicace et préface de Priveli?ti
Carmen Oszi : Collaboration à la presse juive roumaine
Hélène Lenz : Fondane critique de Gide
Speranza Milancovic : La poétique de B. Fundoianu

Etude
Margaret Teboul : Fondane lecteur de Buber
La Conscience malheureuse
Nous avons poursuivi l'étude de ce texte philosophique en nous focalisant sur l'influence de Nietzsche sur la pensée de Fondane. Nous avons pu constater que cet impact fut bien plus profond et plus durable qu'on ne le soupçonnait. D'autre part, Geneviève Piron, qui a lu des textes inédits en russe, a examiné dans une perspective nouvelle la relation entre Fondane et Chestov. Quant à Maria Villela, elle a examiné à travers des écrits posthumes de Husserl le dialogue “manqué” entre les deux philosophes.

L’Exode
Ce long poème, auquel Fondane travailla de longues années et ne put achever, a été l'objet de lectures nouvelles : lecture génétique de Monique Jutrin, analyse des strophes alphabétiques par Claire Gruson, étude thématique par Evelyne Namenwirth.
Certains aspects de l'œuvre roumaine ont été éclairés par Carmen Oszi et par Mircea Martin.
Les exposés seront publiés dans le Cahier Benjamin Fondane, n° 13, 2010.