CONFERENCES "GRAND PUBLIC"
La politique à l’époque des Mousquetaires (1617-1643)
De la nébuleuse d’Orion, découverte par Peiresc, aux exoplanètes
De l’astronomie de Peiresc aux problèmes actuels de l’astronomie
Le mausolée d’Argenton : un tombeau romain monumental dans la montagne
Saint-Tropez, une découverte des néo-impressionnistes
Le Haut-Verdon au temps de Vauban
L'affaire Galilée
 

La politique à l’époque des Mousquetaires (1617-1643)

Conférencier :

Nicole Dhombres, Docteur en Histoire

Lieu :

Annot, Campus Européen Platon

Date :

13 juin 2009

Compte rendu :

Le sujet de cette conférence a été déterminé par le thème du colloque universitaire qui s’est tenu à Peyresq du 14 au 18 juin 2009, Les savoirs au temps des mousquetaires, des tercios et des missionnaires. L’idée étant de vulgariser un savoir de type universitaire pour le mettre à la portée d’un public bien plus large.
Pour ce faire, l’historienne a donc retenu l’époque du règne de Louis XIII, que le grand public connaît par le truchement du grand roman d’Alexandre Dumas, les Trois Mousquetaires. Idéal chevaleresque, courage, sens aigu de l’honneur, passion de l’aventure et de l’exploit, nobles caractères, tout ceci caractérise l’atmosphère du roman. La réalité historique est quelque peu différente. C’est cette réalité que la conférencière a voulu reconstituer, en se servant de documents qui permettaient de rendre cette réalité vivante (portraits, tableaux, dessins, cartes, plans...). Avec pour toile de fond une Europe des Grands - le roi Philippe IV d’Espagne, Charles Ier d’Angleterre, le Capétien Louis XIII, l’empereur d’Allemagne, la Papauté, les puissances politiques italiennes et flamandes. Il a été dit que ces puissances politiques étaient en fait des colosses aux pieds d’argile, fragilisés par bien des facteurs, et en particulier un climat de guerre permanent tant à l’intérieur (complots, révoltes, assassinats) qu’à l’extérieur des frontières des Etats. Cette période correspond en effet à la guerre de Trente Ans où les états européens s’entredéchirent au nom de la religion chrétienne.
La conférencière a ensuite montré que ceux qui souffrirent le plus de cet état de guerre permanent furent les Gueux, en l’occurrence les paysans d’Europe, des populations civiles décimées par le passage des troupes mercenaires qui se paient sur l’habitant, pillent, tuent, rançonnent. Pour sensibiliser le public, ont été utilisés les extraordinaires dessins du peintre-graveur Jacques Callot, en détaillant en particulier sa description du Siège de Breda.
Face à la menace de mort omniprésente dans les sociétés européennes, la conférencière a montré dans la dernière partie de son exposé comment une classe d’humanistes (à laquelle appartient Peiresc qui durant ces années vit sa maturité) s’est mise au travail pour forger un concept d’Etat où le Droit et la Paix soient clairement définis en terme de finalités à atteindre. Il en sortira la figure d’un Richelieu pour la France, et pour l’Angleterre l’image des Pilgrims Fathers s’embarquant en 1620 pour aller fonder ce qui deviendra la démocratie américaine.

De la nébuleuse d’Orion, découverte par Peiresc, aux exoplanètes

Conférenciers :

Jean-Pierre Sivan, Ancien Directeur de l’Observatoire St-Michel de Provence et
Philippe Malburet, Directeur du Planetarium Peiresc d’Aix-en-Provence

Lieu :

Annot, Campus Européen Platon

Date :

2 juillet 2009


La nébuleuse d'Orion

De l’astronomie de Peiresc aux problèmes actuels de l’astronomie

Conférenciers :

Jean Dhombres, Directeur d’études à l’EHESS,
Jean-Pierre Sivan, Ancien Directeur de l’Observatoire St-Michel de Provence et
Philippe Malburet, Directeur du Planetarium Peiresc d’Aix-en-Provence

Lieu :

Peyresq, salle Vinci

Date :

3 juillet 2009

Compte rendu :

A l’occasion de l’année mondiale de l’astronomie, il convenait de célébrer en Haute Provence la découverte par Nicolas-Claude Fabri de Peiresc de la nébuleuse d’Orion. Il la dénomma ainsi, en faisant preuve d’une réelle originalité. Dans l’espace supra-lunaire, il donnait à voir, contrairement aux prescriptions répétées d’Aristote, des phénomènes analogues aux phénomènes terrestres de la météorologie en désignant des nubecula, des sortes de nuages dans une région du ciel. Sur un de ses papiers, on lit en effet à la date du 6 décembre 1610 :

In Orione, in media tam stellae aparuit nubecula, nec quicquam binam stellam distinctione impediebam.

Et Peiresc suit le phénomène observé sur plusieurs jours à la lunette, celle nouvellement mise en valeur par Galilée pour l’astronomie. Cet auteur, par ailleurs un ami de Peiresc, avait quelques mois plus tôt publié Sidereus nuncius, le Messager céleste, par lequel on apprenait l’existence des satellites de Jupiter, la réalité des phases de Vénus, ou l’existence de formes de relief sur la Lune. On l’a fait d’autant plus volontiers que le planétarium Peiresc d’Aix-en-Provence préparait des conférences à ce sujet, et Philippe Malburet, directeur de ce planétarium, pouvait venir à Peyresq, accompagné d’un planétarium démontable. Tandis que Jean-Pierre Sivan, ancien directeur de l’observatoire Saint Michel de Provence, également familier du village de Peyresq dans les années 1950 alors qu’il séjournait à Annot, acceptait de venir parler en spécialiste des travaux sur les exoplanètes, et des richesses découvertes dans la nébuleuse d’Orion précisément, reconnue comme masse de gaz hydrogène à haute température. Il était d’autant plus émouvant que Philippe Malburet parlait à Peyresq dans la salle dite Léonard de Vinci, là où le 28 septembre 1869, naissait le grand-père de son épouse, Jean-Baptiste Mayen, qui devint inspecteur de l’enseignement primaire et s’est éteint à Marseille à quatre vingt dix ans.
Une explication au moyen d’un planétarium installé dans l’église de Peyresq eut donc d’abord lieu le vendredi vers 18h, et le soir même, à partir de 21h30, trois conférences étaient enchaînées. Jean Dhombres put ainsi expliquer, images originales à l’appui, la trajectoire elliptique de Mars, telle que Kepler la donnait à voir ans son Astronomie nouvelle de 1609, qui fut véritablement le début d’un nouveau monde scientifique. Le temps trouvait ainsi à s’inscrire dans la forme géométrique des Grecs au moyen de la loi des aires. Philippe Malburet prenait la suite, et montrait le rôle de Peiresc, en se servant notamment de documents originaux du fonds documentaire conservé à la bibliothèque Inguimbertine de Carpentras. Notamment le tracé de courbes sinusoïdes par Peiresc pour représenter le mouvement de satellites de Jupiter, et ainsi offrir une meilleure représentation que Galilée ne le fit lui-même. Le conférencier pouvait heureusement comparer ces dessins à une simulation, aujourd’hui, de la situation astronomique au moment des observations de Peiresc. L’assistance, nombreuse tant à Peyresq qu’à Annot, et dans chaque ville représentée par son maire, était fascinée par ce regard d’aujourd’hui sur un phénomène aussi original du passé. C’est bien sur l’actualité la plus récente que Jean-Pierre Sivan focalisait son intervention en racontant la première exoplanète déduite autour de Pégase 51, et la façon dont le calcul fut réalisé en calculant la perturbation de quelques m/s sur le mouvement d’éloignement de l’étoile donné en plusieurs km/s, au moyen du spectre de l’étoile. Cela était dû à l’utilisation d’un spectromètre particulièrement performant, et rapide dans le rendu des calculs fournis, qui avait été installé à l’observatoire Saint-Michel de Provence. Ainsi Jean-Pierre Sivan pouvait comparer l’effet de l’instrumentation de 1609 à aujourd’hui : Galilée utilisait la lunette pour voir un nouveau ciel ; les exoplanètes apparaissaient grâce à des instruments spécifiques, et notre regard sur l’univers changeait de la même façon que quatre siècles plus tôt. Le conférencier poursuivait en donnant d’autres méthodes de détection de ces planètes de masse comparable à celle de la Terre, notamment la très faible diminution de luminosité reçue d’une planète lorsque le cône lumineux est traversé par la planète opaque : une image de la courbe de luminosité en forme de U rendait en quelque sorte visible une planète. A une question d’une auditrice, une autre méthode encore était présentée, utilisant l’effet de mirage gravitationnel et la perturbation causée par le passage de la planète soupçonnée. Aussi bien à Annot qu’à Peyresq, ces explications assorties de nombreuses images, retenaient tard l’attention d’un public conquis.
A Peyresq, pour préparer la nuit astronomique, et pour le bonheur de tous, l’ensemble vocal Les Voix du Verdon, sous la direction de Stella Bugalski, de Saint André des Alpes, interprétait a capella, dans l’église de Peyresq rapidement débarrassée du planétarium gonflable, plusieurs morceaux, allant de quatre nocturnes de Mozart au Locus iste d’Antón Bruckner, et un extraordinaire Eli Eli du compositeur Hongrois Gyorgy Deak-Bárdos.


Le mausolée d’Argenton : un tombeau romain monumental dans la montagne

Conférencier :

Anne Roth-Congès, Chargée de recherche au CNRS?Centre Camille Julian Archéologie méditerranéen et africaine

Lieu :

Peyresq, salle Vinci

Date :

15 juillet 2009

Compte rendu :

Situé dans les Alpes du Sud à 1300 m d'altitude, sur la commune du Fugeret (près d'Annot) entre les hautes vallées du Verdon et du Var, le hameau d'Argenton est à l'écart des voies fréquentées et jusqu'en 1976, on n'y accédait qu'à pied ou à dos de mulet. Au début du XXe s. la famille Jacomet y exhuma, au lieu-dit La Font du Caire, à 500 m au nord-est du hameau, trois éléments sculptés dans le grès local : une statue assise (fig. 1), sans tête, sans pieds, un seul bras ; et deux têtes frustes, ne collant pas avec la statue, qui ont disparu depuis. On trouvait également sur ce site, en remploi dans les murettes bordant le chemin et la roubine, des blocs taillés et parfois moulurés en grand appareil, dans le même grès (fig. 2). En 1988 et 1989, deux campagnes de fouilles mirent au jour une centaine d'éléments appartenant au même monument, dont toutefois les fondations ne furent pas retrouvées, probablement emportées par le ravinement. Ces vestiges sont attribuables à un mausolée romain, c’est-à-dire à un tombeau monumental.

Fig. 1: Statue assise de chevalier romain.
Fig. 2: Blocs de grès taillés visibles avant la fouille.
Tous ces blocs et fragments ont été dessinés à l'échelle 1:10, ou supérieure quand nécessaire; leur étude a permis de proposer une reconstitution graphique de l'édifice (fig. 3). Ce mausolée, de plan vraisemblablement carré à la base, d’une hauteur estimée entre 13 et 14 m, relève de la catégorie des tombeaux à étages : sur un socle cubique dont les niches devaient abriter les bustes de la famille du défunt, se dressait un arc quadrifrons (c’est-à-dire à quatre faces) large d’environ 3,50 m, surmonté d’un édicule de plan circulaire que couronnait une flèche à écailles (fig. 4). On peut le dater du second quart du Ier s. avant J.-C. :
1) parce que ce type de tombeau n’apparaît pas en Italie avant 90 av. J.-C.;
2) parce que le monument d’Argenton est d’une conception plus ancienne que le mausolée de Glanum (Saint-Rémy-de-Provence), bâti vers 40 av. J.-C.;
3) parce que la toge de la statue est courte (à partir du règne de l’empereur Auguste : 27 av. J.-C.-14 ap. J.-C., les toges descendent jusqu’aux pieds).
Fig. 3: Hypothèse de restitution du mausolée.
Fig. 4: Toit à écailles du mausolée.
Fig. 5: Elément sculpté trouvé en remploi dans un mur de terrasse par M. Jacomet : un monstre disparu, sans doute un lion, pose ses pattes antérieures sur deux têtes de défunts aux yeux clos.
Fig. 6: Fonts baptismaux de l’église d’Argenton, remployant un bloc du toit du mausolée.

Une rainure étroite sur l’épaule de la statue recevait un ruban de cuivre rouge (disparu) qui désignait le défunt comme un chevalier romain, c’est-à-dire un membre de la seconde classe de la société romaine (en-dessous des sénateurs et au-dessus de la plèbe) : donc un personnage très riche et influent, ayant peut-être à ferme l’exploitation de métaux dont la région est bien pourvue, quoique les environs immédiats n’y soient pas propices; on ne sait s’il s’agit d’un Gaulois enrichi ou d’un Romain venu exploiter la région; on ne sait pas non plus si celle-ci était déjà conquise par Rome (et faisait donc partie de la Province de Narbonnaise) ou pas encore (et faisait alors partie de la Province des Alpes Maritimes). Par sa date haute, son destinataire de haut rang, son type rare, sa situation isolée, le mausolée d’Argenton est exceptionnel parmi les tombeaux monumentaux de la Gaule.
Une bergerie a été restaurée par les jeunes bénévoles du mouvement Alpes de Lumière pour accueillir les vestiges, présentés sur deux niveaux : en bas, une des quatre façades de l’arc; au milieu, le socle circulaire et la statue de l’édicule sommital; en arrière, une des quatre façades du socle inférieur. Une mezzanine devrait abriter une exposition permanente et la maquette du monument; derrière la bergerie, un hangar devait accueillir les blocs non intégrés dans la présentation. Malheureusement, le chantier a été arrêté faute de crédits. De ce fait, un certain nombre d’éléments sont conservés dans l’église d’Argenton : deux bustes sans tête (sans doute celles qui ont disparu); deux acrotères (éléments aux angles des toits), un à palmette, l’autre à palmette et visage (mutilé); le haut de la flèche à écaille du toit; un monstre (lion ou tarasque) dont le corps a disparu mais dont il reste le socle et les pattes, celles de devant reposant sur deux têtes humaines (fig. 5); etc. Deux éléments du mausolée ont été remployés : dans l’église, une partie de la flèche à écailles, retournée, sert de fonds baptismaux (fig. 6); et un troisième buste sans tête porte la croix de la porte du cimetière (fig. 7).

Anne Roth Congès
Centre Camille Jullian, CNRS
Aix-en-Provence

Fig. 7: Buste funéraire privé de sa tête, remployé comme socle de la croix du cimetière d’Argenton.

Saint-Tropez, une découverte des néo-impressionnistes

Conférencier :

René Dalemans, Historien de l’Art, Université Libre de Bruxelles

Lieu :

Villars-Colmars, salle polyvalente

Date :

5 août 2009

Compte rendu :

En mai 1892, l’Olympia, le voilier du peintre Paul Signac (1863-1935) accompagné de son ami belge Théo van Rysselberghe (1862-1926), jette l’ancre dans la baie du petit port de pêche de Saint-Tropez.
A l’instigation d’un autre compagnon de combat pour la défense de la nouvelle peinture, Edmond-Charles Cross (1856-1910), Signac a quitté les rives de l’Atlantique pour découvrir la lumière méditerranéenne.
En réalité l’aventure néo-impressionniste connaît ses débuts publics en 1886 lors de la dernière exposition impressionniste. Le public y découvre la toile “Un dimanche après-midi à la grande Jatte” de Georges Seurat (1859-1891). Mais amateurs et critiques se moquen de cet assemblage de confettis qui ne trouve aucun écho dans la presse.

En 1887 “la Grande Jatte” est présentée à Bruxelles à l’exposition du “Groupe des XX”, l’un des mouvements esthétiques les plus dynamiques de l’Europe fin de siècle.
Le critique français Félix Fénéon (1861-1944) qui ne se trompe jamais pressent l’importance de cette esthétique nouvelle et publie dans le journal bruxellois “l’Art Moderne” du 19 septembre un papier qui pour la première fois consacre le terme de néo-impressionnisme.
L’époque, imprégnée de positivisme et d’esprit scientiste, veut pénétrer les phénomènes optiques et des traités nombreux dus à des chimistes et à des physiciens (Chevreul, Helmholtz,…) donnent aux peintres la justification de leur recherche sur la lumière et la couleur.
Signac, le pionnier, mort trop tôt ouvre la voie qu’emprunteront Signac, fidèle à la mémoire de son ami, Cross, Luce, Lucien Pissarro, ainsi que les Belges Finch, Van Rysselberghe, Van de Velde, Claus, Lemmen, Boch,…
La Côte d’Azur voit ainsi débarquer de nombreux artistes qui de génération en génération se transmettront leur passion pour la couleur pure : le fauvisme de Derain et Matisse, l’abstraction de Kandinsky et Mondrian, le futurisme de Balla et Severini seront tous nourris aux sources de l’aventure qui s’est épanouie au bord de la “Grande Bleue”.

René Dalemans


Le Haut-Verdon au temps de Vauban

Conférencier : Olivier Joseph, Editeur et Historien
Lieu : Peyresq, salle Vinci
Date : 14 août 2009
Compte rendu :

Sébastien le Prestre de Vauban né en 1633 à Saint-Léger-Vauban près d'Avallon (89), est Ingénieur militaire du roi Louis XIV à 22 ans et le sert durant 53 ans. Il fut le constructeur de nombreuses places-fortes aux frontières de ce qu'est aujourd'hui le territoire français, son hexagone, son “pré carré”. Il adapta parfaitement son système de défense au terrain, et fut un preneur de villes hors pair, ménageant la vie des soldats et des populations. Il est au poste de Commissaire des Fortifications à 44 ans jusqu'à sa mort le 30 mars 1707. Vauban, un homme à découvrir, un homme à la pensée très moderne, un homme de paix.
Parmi les villages fortifiés situés dans les Alpes de Haute-Provence, Colmars-les-Alpes, cité historique de caractère, illustre les différents styles de fortifications.
Aux confins du Haut-Verdon, Colmars subit en 1690 les attaques piémontaises. Il faut donc renforcer la place, déjà fortifiée par François Ier. C’est Niquet, ingénieur général des fortifications, qui s’y colle et met au point le plan de la ville. C’est durant le règne de Louis XIV que Vauban, ingénieur du roi et homme de guerre, crée en 1692, au sein de l’artillerie, un premier corps spécialisé constitué de sapeurs et de mineurs.
Vauban construit alors près de 300 places fortes en employant la technique des fortifications bastionnées.
Porte de Savoie…
Fort de France à Colmars-les-Alpes

L'affaire Galilée

Conférencier : Jean Dhombres, Directeur d’études à l’EHESS
Lieu : Saint-André-les-Alpes, salle polyvalente
Date : 27 août 2009
Compte rendu :

On a pris l’habitude de parler de “l’affaire Galilée” depuis l’époque même où vivait ce savant. C’est que l’enjeu dépasse l’histoire d’un homme pour atteindre l’histoire même de l’homme, notre histoire donc. A partir de l’été 1633, Galilée dut vivre en résidence surveillée près de Florence, ayant risqué à Rome la torture et l’emprisonnement à vie. Officiellement, pour avoir soutenu que la Terre tournait autour du Soleil et tournait sur elle-même en 24 heures. Peiresc, seigneur du village actuel de Peyresq, qui avait sympathisé avec Galilée lorsque ce dernier était professeur de mathématiques à Padoue, au tout début du XVIIe siècle, et bien qu’abbé de Guîtres et conseiller du Parlement de Provence, n’hésitait pas à écrire au neveu du pape, pour dire combien l’histoire jugerait sévèrement la papauté, et sans doute le catholicisme, pour avoir laissé ainsi condamner le savant.

De cette histoire connue de tous, Jean Dhombres, le conférencier venu une nouvelle fois à Saint-André les Alpes, ne cherchait pas dans les comportements personnels de Galilée à trouver on ne sait quelles excuses pour les juges romains. Même si l’homme était peu commode, mordant et vif, comme le sont le plus souvent les intellectuels qui ne sont pas des courtisans. Il s’agissait plutôt de comprendre par quels mécanismes le pouvoir romain, par le biais du tribunal de l’inquisition et par la commission de l’index des livres prohibés, en était arrivé à condamner Galilée. Alors que ce dernier avait été un ami du cardinal Mafeo Barberini, avant qu’il ne soit élu pape en 1623. Il s’agissait aussi de comprendre comment l’université, pour sauver un système philosophique ancien, avait préféré lancer le débat sur l’interprétation de l’Ecriture sainte. Au risque d’en pervertir la valeur, en créant un fondamentalisme du sens littéral dont les dangers se font sentir de nos jours encore dans bien des religions. Il fallait de plus comprendre l’importance des alliances politique alors que la guerre avait repris en Allemagne et dans les Pays-Bas espagnols, et entraînait bientôt la lutte entre l’Espagne et la France, toutes deux puissances catholiques. Du côté de l’Inquisition, il faut comprendre comment un système peut devenir totalitaire, et échapper même au pouvoir qui lui a donné une mission; du côté de l’université et de intellectuels, il faut aussi comprendre que le progrès n’est pas un long fleuve tranquille, et que le savant, qui peut aussi bien que tout homme être aveuglé par ses passions, n’en dispose pas moins de moyens essentiels avec le raisonnement, l’expérimentation, les mathématiques, et la discussion, contre les traditions. Le conférencier a donc donné à lire et à voir Galilée: par ses portraits, par ses textes, notamment par la forme de dialogue utilisée pour faire valoir ses assertions scientifiques, sans oublier ses démonstrations mathématiques, assistées par des images. N’assiste-t-on pas, avec Galilée, à la naissance d’un nouvel humanisme? La qualification d’humanisme scientifique n’est sans doute pas la plus mauvaise.