UNIVERSITES D'ETE
Ecologie et végétation
Ethnopaysages et GPS
Ecologie et Insectes
Floristique en Haute-Provence
 
Ecologie et végétation
 

Organisation :

Professeur Jean Lejoly (Botanique systématique et phytosociologie - ULB)

Coordinateur : Monique Gabriel

Dates :

1 au 11 juillet 2007

Participants :

Jean Lejoly (B), Shalukoma (RDC), Adolphe Nfotabong (Cameroun), Faustine Kouassi (Côte d’Ivoire), Ferdinand Nyongabo (Burundi), Léon Iyongo (RDC), Haba Ouo-Ouo (Guinée Conakry), Fonseca Sarah Magalhaes, David Fage, Nicolas Vanlangendonck, Emily Triffaux, Marie Deconinck, Marianne Demarteau, Joonas Parikka Kaarle, Nina Wauters, Jason Vleminckx, Frédéric Fontaine, Isaline Daubie, Bruno Cachapa, Julien Flandroy, Marine Kuypers, Caroline Stevigny, Frédéric Vizzini, Patrick Chavel, Jean-Claude Moniquet, Colette Dechèvres.

Lien web : http://www.ulb.ac.be/sciences//bota/
http://www.herbier-a3v.org

Ethnopaysages et GPS
 

Organisation :

Jean-Pierre Herremans (Botanique systématique et phytosociologie - ULB)

Coordinateur : Monique Gabriel

Dates :

1 au 11 juillet 2007

Participants :

Jean-Paul Herremans, Monique Vancraenenbrouck, Yannick Herremans, Yonathan Herremans, Gaelle Herremans, Manon.

Internet : http://www.ulb.ac.be/sciences//bota/

Ecologie et Insectes
 

Organisation :

Professeur Guy Josens (Ecologie et systématique animales - ULB)

Coordinateur : Monique Gabriel

Dates :

1 au 11 juillet 2007

Participants :

Guy Josens, Jonathan Walravens, Claude Arbula Smet, Cindy Maslarov, Martina Stefkovaz, Anicée Lombal, Noémie Cluytens, Guillaume Delhaye, Nathalie De Clerck, Elodie Deltour, Benjamin Cluytens


Floristique en Haute-Provence
 

Organisateur :

Professeur Philippe Jauzein - Institut national agronomique de Paris-Grignon

Coordinateur : Monique Gabriel

Dates :

1 au 11 juillet 2007

Participants:

Philippe Jauzein, Emmanuel Coiffait, Mme Coiffait, Olivier Nawrot, Pascale Chaput.


Flore messicole de St André des Alpes

L’évolution des populations d’adventices des cultures est soumise à de multiples facteurs, certes en grande partie agronomiques, mais aussi édapho-climatiques. Les fluctuations des effectifs sont ainsi imprévisibles, et peuvent masquer la raréfaction globale de nombreuses espèces. En 2007, la flore des céréales était particulièrement spectaculaire dans les rares parcelles servant de refuge à cette biodiversité souvent oubliée et méconnue. Seule une enquête précise aurait permis de comprendre si ce sursaut correspond à une conduite particulière des cultures ou à des aléas climatiques : sans doute les deux.. En particulier, le champ de sainfoin implanté en 2006 était, cette année-là, très pauvre (forte compétitivité de la plante cultivée) ; en 2007, le sainfoin repoussait de souche, mais avait aussi été ralenti par un climat particulièrement sec, laissant suffisamment d’espaces pour les adventices.
Cette flore correspond à un ensemble de quatre parcelles situées près du hameau de La Mure.

I - Origine de cette flore variée

1 - La flore spontanée : avant l’agriculture
Dans les parcelles d’agriculture traditionnelle, l’opération qui impose la plus forte pression de sélection sur la végétation potentielle est le labour. En supprimant toute la végétation en place, ce travail du sol ouvre l’espace aux espèces pionnières aptes à coloniser les milieux perturbés. Deux types biologiques correspondent à cette stratégie : les thérophytes (plantes annuelles : 75% des espèces des céréales), et les géophytes à forte multiplication végétative (plantes vivaces dynamiques : 25% des espèces des céréales) ; les autres types biologiques sont exclus sur les sols profonds, ne pouvant parfois s’exprimer que dans les parcelles à sol superficiel, en particulier dans les fourrages temporaires (luzernes ou sainfoins dans la région).
En milieu naturel, ces espèces pionnières se réfugient dans les espaces où la végétation est limitée par certains facteurs édapho-climatiques :
- perturbations périodiques sur les fortes pentes éboulées, sur les alluvions soumises à l’action des crues, ou plus localement à proximité des terriers d’animaux…
- milieux à sol presque absent, soumis à une forte sécheresse estivale, comme les balmes des nombreuses falaises présentes dans la région.

1.1 - Les espèces vivaces
Anchusa azurea
Centaurea scabiosa
Cirsium arvense
Convolvulus arvensis
Gladiolus italicus
Isatis tinctoria
Knautia arvensis
Phleum pratense subsp. nodosum
Poa compressa
Poa trivialis
Ranunculus bulbosus
Sanguisorba minor
Cirsium arvense (L.) Scop.
Gladiolus italicus Mill.
Ces espèces ont des stratégies très variables. Certaines ont une souche solide, s’abritant en profondeur dans le sol : Anchusa, Centaurea, Knautia. D’autres maintiennent un stock semencier grâce à un premier cycle annuel : Isatis (pastel), Poa trivialis, Sanguisorba (pimprenelle). La mise en réserve dans des tubercules permet une dormance en saison sèche, et permet aussi de supporter un enfouissement modéré dans le sol : Gladiolus (glaïeul), Phleum (fléole), Ranunculus (bouton d’or). Les plus dangereuses investissent dans une importante multiplication végétative, encore modérée chez Poa compressa (rhizomes), mais très efficace chez Cirsium (chardon) et Convolvulus (liseron) qui ont la capacité à néoformer des bourgeons directement sur les racines profondes. En cas d’intensification, il est évident que seules ces 2 espèces seraient sélectionnées et pourraient alors envahir les parcelles.
Isatis et Gladiolus sont des archéophytes (voir la définition en 2ème partie) ; le pastel a été introduit comme plante cultivée tinctoriale.

1.2 - Les espèces annuelles de milieux pauvres
Certaines s’observent dans les éboulis : Galeopsis et Teucrium
Certaines se localisent aux marnes et alluvions : Chaenorrhinum, Euphorbia terracina, Medicago lupulina
La plupart poussent dans les pelouses et rocailles :
Ajuga chamaepytis
Alyssum alyssoides
Alyssum minus
Anthemis arvensis
Arenaria serpyllifolia
Avena sterilis
Bombycilaena erecta
Bromus arvensis
Bromus squarrosus
Bromus tectorum
Bufonia paniculata
Crupina vulgaris
Echinaria capitata
Galium aparine subsp. spurium
Linaria supina
Lolium rigidum
Myosotis arvensis
Papaver dubium
Petrorhagia prolifera
Tragopogon crocifolius
Veronica arvensis
Veronica praecox
Vulpia unilateralis
Xeranthemum inapertum
Linaria supina (L.) Chaz.
Les espèces soulignées ont effectivement été trouvées dans les milieux naturels des environs : parmi les autres il y a peut-être des archéophytes ?

1.3 - Les espèces annuelles nitrophiles
Il est difficile d’affirmer la spontanéité de telles espèces, sans doute autrefois strictement localisées : terriers ou berges exondées eutrophies. Plusieurs d’entre elles font peut-être partie des archéophytes : brome, carotte, fumeterres, moutarde…
Aegilops triuncialis
Anagallis arvensis
Bromus sterilis
Crepis foetida
Crepis pulchra
Crepis setosa
Caucus carota
Fumaria officinalis
Fumaria vaillantii
Galium aparina subsp. aparine
Lactuca serriola
Lamium amplexicaule
Polygonum aviculare
Reseda phyteuma
Scorzonera laciniata
Sinapis arvensis
Sisymbrium austriacum
Tragopogon dubius
Fumaria Officinalis L.
2 - La flore introduite
Seules des preuves archéologiques peuvent permettre de répondre aux nombreuses questions qui se posent sur l’origine des adventices, et sur la responsabilité de l’homme dans leur apparition sur notre territoire. Beaucoup de travail reste à faire dans ce domaine : certaines espèces de la liste précédente pourraient figurer ici, et inversement, certains des archéophytes cités existent peut-être en milieu naturel dans la région.

2.1 - Les néophytes
Il s’agit des espèces dont l’introduction a eu lieu durant les derniers siècles. Autant ces plantes représentent une part importante de la flore des milieux anthropiques de plaine, autant leur contingent se raréfie à mesure de l’isolement des parcelles. Seule Veronica persica est ici présente, introduite en France depuis environ 2 siècles.

2.2 - Les archéophytes
Ce terme regroupe toutes les espèces arrivées sur notre territoire avant le XVIème siècle, la plupart dès le néolithique, en impuretés dans les lots de céréales : elles ont suivi le blé lors de sa migration.
Adonis flammea
Agrostemma githago
Anthemis altissima
Asperula arvensis
Bifora radians
Bupleurum rotundifolium
Camelina sativa subp. sativa
Camelina sativa subsp. microcarpa
Caucalis platycarpos
Centaurea cyanus
Consolida regalis
Euphorbia falcata
Fallopia convolvulus
Galium tricornutum
Legousia speculum-veneris
Lithospermum arvense
Neslia paniculata
Papaver argemone
Papaver rhoeas
Polygonum bellardii
Ranunculus arvensis
Stachys annua
Thymelaea passerina
Torilis arvensis
Valerianella coronata
Vicia pannonica subsp. purpurascens
Viola tricolor subsp. arvensis
II - Cas particulier des archéophytes

Parmi ces archéophytes, certaines espèces n’ont aucun équivalent dans la flore locale : Adonis, Agrostemma, Asperula, Bifora, Bupleurum, Camelina, Caucalis, Centaurea, Consolida, Neslia…Agrostemma, la nielle des blés, a été considérée comme une des principales mauvaises herbes des céréales jusqu’au début du XXème siècle ; originaire d’Anatolie, elle a migré au néolithique, s’est parfaitement adaptée aux céréales, mais a subi l’amélioration des techniques de tri des semences ; les herbicides ont ensuite eu raison de la plupart de ses populations : elle a disparu d’une grande partie du territoire. Il est amusant de la retrouver chez certains horticulteurs comme plante ornementale, avec des fleurs cependant transformées par la sélection.
D’autres constituent des couples : par exemple Galium tricornutum proche de G. aparine, Legousia speculum-veneris proche de L. hybrida ou Papaver rhoeas proche de P. dubium… Cette dualité peut s’exprimer au niveau infra-spécifique quand une sous-espèce sans doute plus orientale rejoint une sous-espèce locale : par exemple chez Lithospermum arvense, Thymelaea passerina et peut-être Torilis arvensis ou Viola tricolor.
Certains de ces archéophytes ont été cultivés anciennement et se maintiennent dans les céréales en témoins de leur passé domestiqué : exemple de la caméline et de la vesce. Il en est de même du pastel cité parmi les espèces vivaces. Il semble que la caméline soit d’abord apparue comme adventice (subsp. microcarpa) avant d’être reconnue comme plante oléagineuse et sélectionnée pour être cultivée (subsp. sativa).

II - Le plan d’action sur les messicoles

Le Ministère de l’Environnement a fini par s’émouvoir du désespoir des botanistes devant l’extinction programmée de la flore des moissons. Il faut dire que, malgré leur rareté croissante, ces espèces ne bénéficient d’aucune protection légale : les listes de plantes protégées ne peuvent s’appliquer dans les parcelles agricoles !
Une enquête a été lancée, qui a abouti à la publication d’une plaquette : 2 listes ont été dressées, comprenant 50 espèces prioritaires menacées à court terme (dont la moitié sont des archéophytes), et 32 espèces à surveiller (populations en effondrement).

Si l’on compare la flore de St André à ces listes, on remarque qu’une dizaine d’espèces appartiennent à la liste prioritaire : le sixième des espèces prioritaires de France est donc présent sur ces parcelles ! Ensuite, une quinzaine d’espèces appartiennent à la deuxième liste, ce qui représente la moitié de cette liste nationale.


CONCLUSION

La richesse de ces parcelles ne doit surtout pas faire illusion, et laisser croire que ces espèces, en particulier les archéophytes, sont encore abondantes. Il faut bien avoir conscience que cette région des Alpes de Haute-Provence est une des plus riches de France dans ce domaine, et que ces quelques champs représentent un des derniers témoins des anciennes moissons fleuries.
L’évolution récente est inquiétante. En quelques années, l’effectif des sites riches en messicoles a fondu : en particulier vers Thorame où ils étaient nombreux. Des cultures de légumineuses fourragères ont souvent pris la place des céréales : s’agit-il de prairies temporaires, ou d’une évolution de fond de l’agriculture locale ?
Dans ce contexte, le site de St André prend toute sa valeur. Y envisager une action officielle de protection serait tout à fait mérité.

Prof. Philippe Jauzein
Institut National Agronomique Paris-Grignon
Papaver dubium L.
Lactuca serriola L.